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Discours de Charles DeGaulle : Allocution radiotélévisée du 13 juin 1958 (13/06/1958)

Texte du discours de Charles De Gaulle, le 13 juin 1958 à la télévision :


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L’unité française se brisait. La guerre civile allait commencer. Aux yeux du monde, la France paraissait sur le point de se dissoudre.

C’est alors que j’ai assumé la charge de gouverner notre pays.

Le drame de l’Algérie, bouleversant les populations, mettant l’armée à dure épreuve, soulevant sur place une vague d’indignation pour ce qui était du présent, de changement et de fraternité pour ce qui était de l’avenir, a déclenché cette crise nationale.

Mais, de toutes les manières, celle – ci devait éclater.

Car, depuis 12 ans, le régime des partis, flottant sur un peuple profondément divisé au milieu d’un univers terriblement dangereux, se montrait hors d’état d’assurer la conduite des affaires. Non point par incapacité ni par indignité des hommes. Ceux qui ont participé au pouvoir sous la quatrième République étaient des gens de valeur, d’honnêteté, de patriotisme. Mais, ne représentant jamais autre chose que des fractions, ces gouvernants ne se confondaient pas avec l’intérêt général.

D’ailleurs, opposés entre eux comme l’étaient leurs propres groupes, aux prises avec les empiétements de l’Assemblée parlementaire dont ils tenaient leurs fonctions, soumis aux exigences des partis qui les y déléguaient, ils se trouvaient condamnés à vivre, pour quelques mois ou quelques semaines, en face de problèmes énormes sans qu’il leur fût possible de les résoudre.

J’ai dit : des problèmes énormes. Ils l’étaient, en effet, ceux qui se posaient à eux. Ils le sont, ceux que nous allons devoir affronter ensemble : pacifier l’Algérie, faire en sorte qu’elle soit pour toujours de corps et d’âme avec la France, organiser sur le mode fédéral les liens de notre métropole avec les peuples associés d’Afrique et de Madagascar, établir sur la base de la coopération nos rapports avec le Maroc, la Tunisie, les Etats d’Indochine.

Dans le monde occidental auquel nous appartenons, sans devoir nous y confiner, prendre une place qui nous soit propre, mener une action qui soit notre action, en vue de servir à la fois le pays et la sécurité.

A l’intérieur, accomplir l’effort très dur, mais absolument nécessaire, de remise en équilibre de nos finances et de notre économie, faute duquel notre pays s’en irait à une stupide catastrophe, mais grâce auquel il verra s’ouvrir la carrière de la prospérité. Voilà, Françaises, Français, ce qu’il nous faut faire tout d’abord.

Pour commencer, je vous demande, oui, je vous demande instamment d’assurer un succès triomphal à l’emprunt que nous allons ouvrir, première étape de notre redressement, première preuve de confiance nationale que vous vous donnerez à vous – mêmes, et, permettez – moi de le dire, que vous m’accorderez à moi, qui en ai tant et tant besoin.

« Tout cela, n’est – ce pas trop pour nous ? », murmurent ceux qui, à force de croire que rien ne peut réussir, finissent par le désirer, ceux qui ont pour secrète devise celle de Méphistophélès, démon disert des désespoirs : « Je suis l’esprit qui nie tout ». Non. Ce n’est pas trop pour la France, pour ce pays merveilleux qui, en dépit de ses épreuves passées et du désordre de ses affaires d’Etat, trouve moyen d’avoir dans son jeu tous les éléments d’un extraordinaire renouveau.

Une population qui s’accroît. Une économie qui a, une fois pour toutes, dépassé le cap de la routine. Une technique qui va de l’avant. Des sources nouvelles de capacité, qui sont prêtes à jaillir des plus profondes couches populaires. Le Sahara qui contient la fortune pour nous et pour les territoires qui le bordent au nord et au sud.

Une armée très belle et très bonne. Le monde enfin qui désire, même s’il affecte parfois le contraire, de nous voir jouer le rôle qui nous revient parce qu’il sent que ce sera à l’avantage de tous les hommes.

Ah ! je ne plains pas notre jeunesse qui voit s’offrir à elle toutes ces ressources de la vie, tous ces ressorts de l’activité.

Mais il n’est pas un Français qui ne sache que tout avenir nous est bouché si la France n’a pas pour la guider un Etat qui en soit capable. C’est la condition de tout.

Nous venons de le vérifier sur le bord même de l’abîme. J’ai pour tâche avec mon gouvernement, de proposer à notre peuple des institutions nouvelles, telles qu’il y ait dans la République des pouvoirs assez forts, assez stables, assez efficaces, pour répondre de son destin.

Je le ferai au début de l’automne.

Françaises, Français, c’est vous qui alors déciderez par vos suffrages de cette réforme capitale, et par là du sort de la France.

La route est dure, mais elle est belle.

Allons ! Le départ est donné.

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