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Discours de Charles De Gaulle – Allocution radiotélévisée du premier août 1958 (01/08/1958)


Un pays rempli de valeurs humaines et matérielles, un pays qui se découvre des ressources en pétrole, en gaz, en énergie atomique capables de renouveler son économie tout entière et qui sent monter en lui une jeunesse ardente et nombreuse ; un pays que ses épreuves ont pu affaiblir, diviser, humilier, mais qui a trouvé moyen de rester vivant et libre ; ce pays – là c’est la France. Mais, aussi, la France, c’est un pays où la négligence et le laisser-aller ont failli compromettre l’avenir en une époque dure et dangereuse.

Eh bien ! Nous avons décidé de rompre avec ces faiblesses, qu’il s’agisse des institutions, des relations avec l’étranger, ou de ce qui se passe chez nous. Je vous exposerai bientôt quelle Constitution nouvelle sera proposée au peuple. Je vous montrerai prochainement ce qu’est l’action extérieure de la France qui se redresse. Ce soir, je veux vous préciser ce qui se fait pour remettre en ordre nos affaires à l’intérieur.


Ce qui se fait, c’est tout bonnement stabiliser notre situation financière, monétaire, économique, arrêter la descente aux abîmes de l’inflation, nous assurer la base sur laquelle nous pourrons construire notre aisance et notre puissance.

En dépit du supplément de charges que nous venons d’assumer pour la pacification et la mise en valeur de l’Algérie, le développement de l’énergie atomique, la construction immédiate d’un bon nombre de nouveaux logements, nous entendons maintenir le rapport entre les recettes et les dépenses publiques exactement au chiffre prévu. En même temps nous voulons arriver à équilibrer nos échanges, tout en important ce qu’il faut, en fait de matières premières, pour que notre industrie ait de quoi poursuivre son expansion. Enfin nous sommes résolus à empêcher la montée des prix afin que le niveau de vie ne subisse pas de diminution.

Les mesures prises par le gouvernement ont toutes pour but cette stabilisation. L’emprunt, grâce à la confiance d’innombrables souscripteurs, nous évite d’avoir à recourir aux avances de la Banque de France et a mis aux caves de celle – ci assez d’or pour que le règlement de nos importations soit assuré au cours des prochains mois. Mais il nous faut faire davantage, car il n’y a pas de miracles, à moins qu’ils ne soient mérités.

A toutes les catégories françaises j’ai demandé, je demande de prendre une part des sacrifices grâce auxquels s’ouvrira largement la porte de l’espérance.

C’est ainsi que les agriculteurs voient fixer le prix du quintal de blé à 113 francs au-dessous de celui qu’ils étaient d’abord en droit d’attendre. C’est ainsi que rien ne peut actuellement être ajouté à la rémunération du personnel des services publics, des fonctionnaires, des militaires, malgré les quasi-promesses qui, naguère, leur avaient été faites, et qu’il doit en être de même pour les travailleurs du secteur privé. C’est ainsi que maints producteurs et commerçants ont à consentir ou à subir des baisses notables sur leurs prix de vente. C’est ainsi qu’environ 5 000 000 000 d’impôts supplémentaires viennent d’être mis à la charge des possédants. C’est ainsi que le litre d’essence coûte à peu près 3 francs de plus qu’hier. Il y a là un ensemble de renoncements méritoires que les Français offrent à la France de bon cœur, d’autant plus que ce n’est pas en vain.

Car notre effort porte déjà ses fruits. La stabilisation commence à, le gouvernement garantit que nous bouclerons le budget de 1958 sans recours à l’inflation s’établir. Le 31 mai dernier le déficit de la balance de nos paiements à l’extérieur atteignait 7 100 000 000 de francs. Aujourd’hui nous sommes en avance de plus de 25 000 000 000. La moyenne des prix a tendance à se fixer. La valeur du franc sur les marchés du monde n’a pas cessé de s’améliorer.

Il est vrai qu’à l’extérieur se dessine la possibilité d’une difficulté nouvelle. Divers pays ont vu se ralentir pour quelque temps le rythme de leur activité. Il pourrait survenir chez nous aussi un début de récession, auquel le gouvernement aurait le devoir de parer.

Mais en outre, le cas échéant, nous saurions faire jouer la solidarité économique et nationale. Dès à présent je fais appel aux organisations patronales et ouvrières. Je demande qu’elles entrent en contact afin de créer en commun un fonds de salaires garantis. Ce fonds procurerait aux travailleurs la sécurité d’une rémunération de base et des facilités de reclassement professionnel. Je sais à qui je m’adresse et je suis sûr d’être entendu.

La France a pris le départ dans la course à la prospérité. Pourvu qu’elle tienne la ligne en ordre et résolument, je réponds d’une belle arrivée.

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